Avalée par l'océan, la naufragée rêve de la vie qu'elle aurait du avoir et qui stagne dans ses poumons
Elle avait voulu disparaitre pour se fondre dans la lumière, la douceur, la verdoyance, seulement pour s’engouffrer dans de violentes ténèbres incolores. Elle était arrivée sur Terra loin de l’herbe douce, du soleil et des fleurs ; loin de la rive, dans l’eau froide et tumultueuse d’un orage houleux.
Elle savait nager, mais les vagues puissantes la poussaient vers l’abime. Elle cherchait son souffle qui s’inondait et battait l’air de ses bras que les vagues dévoraient avec avidité.
Finalement, sa force l’abandonna, et elle s’endormit au creux des vagues berçantes.
Elle s’était endormie, seulement pour se réveiller dans un rêve. Le sable chaud et le soleil caressaient sa peau nue ; l’air odorant et pur, ses sens émergents. Il lui sembla pour quelques instants avoir coulé jusqu’à toucher le ciel, jusqu’à ce que soudain une douleur aigüe parcoure sa gorge et que poussée par la douleur, elle se redresse pour cracher l’incendie liquide qui brulait ses poumons.
Un jeune garçon l’observait. Il avait la peau foncée et ne portait qu’un pagne. Il se nommait Prana, ce qui dans sa langue se traduisait par souffle de vie. Hessa et l’enfant ne parlaient pas la même langue, mais il put lui montrer où trouver de la nourriture et où dormir.
L’ile aride s’étendait en hauteur : en dehors des escarpements rocheux, il y avait la plage qui était parsemée de coquillages, et qui donnait sur un demi-kilomètre carré de verdure. Prana avait su ériger un abri de fortune contre une paroi de roche, à la limite du sable et du boisé.
Le garçon vivait seul sur l’ile depuis longtemps, et survivait au rythme d’une routine que l’expérience améliorait : ramasser des fruits, ramasser des coquillages, pêcher, construire de meilleurs outils, devenir plus rapide, améliorer sa condition de vie.
D’ailleurs, au lendemain du naufrage d’Hessa, ils trouvèrent sur la plage une sandale, ainsi que l’un des trois sacs qu’elle avait perdus. Celui-ci contenait une couverture, des vêtements et quelques bijoux. Pas d’eau potable, pas de nourriture, pas d’outils. Par contre, ils trouvèrent plusieurs gros fruits juteux venus d’iles lointaines, ainsi que des mollusques. Miraculeusement, sa deuxième sandale s’échoua quelques jours plus tard, au grand soulagement de ses pieds à vif.
Au début, Hessa trouvait le temps long et fronçait les sourcils à l’idée de travailler tous les jours sur les exactes mêmes tâches. Elle trouvait l’enfant laid, et ne daignait communiquer avec lui que lorsque sa survie l’exigeait. Malgré tout, l’enfant était gentil avec elle et la guidait patiemment dans son accoutumance. Elle finit par admirer chez lui une force inépuisable qui l’amena à lui accorder son amitié. Ensemble, ils agrandirent leur habitation et Hessa prit plaisir à l’enjoliver avec des fleurs et des coquillages. Comme l’ile était épargnée par le froid, elle confectionna à partir des couvertures colorées des vêtements, d’abord pour elle, mais aussi pour Prana.
Elle était sur l’ile depuis déjà plusieurs semaines lorsqu’elle enfila pour la première fois ses bijoux, ses cymbalettes et ses foulards pour danser. Prana l’avait regardé avec de grands yeux émerveillés jusqu’à ce qu’elle l’entraine avec elle sur le rythme improvisé des petites soucoupes de métal.
Plus tard, Hessa confectionna un tambourin de bois et de coquillages.
Ceci est une partie de la fiche de présentation d'Hessa. Ces évènements se déroulent donc dans le passé, plus précisément vers entre la fin de la troisième année et le début de la quatrième. |