Chronologie Renversée
You may have been many things, many persons. But this is about who you are now,
Tell me who you are. How did you become what you are now?
AU DEPART
Possessions enregistrées
Rien du tout : quand il y a tout, rien n’est plus et quand il n’y a plus rien, c’est là que tout se passe ; cela répété en boucle en finit à la conclusion que tout coule et rien ne demeure.
Brumes
Au dessus de ses lèvres, un mince filet de vapeur.
Qui disparait aussitôt.
Il halète.
J’ai dormi, rêvé… ? Bugué sur une réflexion beaucoup trop longtemps ? Et encore cette fichue migraine… Valentine commence même à croire qu’elle est fictive.
Tout comme cette histoire.
Pourtant, un léger courant d’air froid est passé sur sa nuque. Pourtant, il a aussi senti ce sol marbré d’un froid cherchant à traverser son corps mollement étalé sur le côté. D’un effort qui lui a paru décalé, il s’est efforcé de basculer sur le dos, peinant à reprendre son souffle, pendant que sa conscience s’est mise à cartographier et à sonder son environnement indépendamment de sa volonté. Seulement alors, il se rend finalement compte qu’il fait nuit. Et quand son regard a commencé à se calquer sur un état mental plus éclairé,
…Valentine a brusquement refermé les yeux.
CAR CECI EST UNE
Machination
Note: L'intégralité de cette fiche tire volontairement certaines similarités avec le même personnage que je joue dans un autre forum. L’histoire peut se lire en remontant par le dernier paragraphe de ce post. Car ceci ...est véritablement une machination.-Votre IRM s’est bien passée, monsieur Valentine. Les résultats de la radio confirment quant à elles que vos fractures se sont bien ressoudées. Votre…
Yui Valentine a secoué la tête pour interrompre à temps ce récitatif.
-Dites moi plutôt si je vais mourir.
Un sourire du coin des lèvres et le Dr. Oliver a fixé son patient avant de ressortir.
-Non je ne crois pas Yui. Je ne crois pas que vous mourrez aujourd’hui.
C’était sans doute la cinquantième fois que Yui Valentine lui posait cette même question. Exactement quarante-huit, autrement dit une fois tous les jours depuis qu’il l’avait recueilli dans son centre. Cela dit, comme à chaque fois qu’il lui répondait la même chose, Valentine est paru plus détendu, se laissant aller contre son oreiller.
Dans la tête d’Alan Oliver, tout ceci n’avait plus d’importance car demain, Yui Valentine serait suffisamment apte à ne plus faire partie de ce monde. Il devrait toutefois agir assez vite car il se doutait que son patient cesserait à un moment ou à un autre de se contenter de ce quotidien. Dr Oliver soupçonnait d’ailleurs que Valentine, cet être hypocondriaque et de futilités ait déjà commencé à se poser des questions. Entre temps, Ame Tsukiyo son agent double, avait eu le temps de le débriefer au sujet de Yui Valentine, de long en large et en travers.
RUINES, FRAGEMENTS,
Débris
Vous êtes un horrible psychologue.
Je me demande comment vous avez fait pour devenir un psychologue aussi atroce.
Merci de m’avoir soigné mais j’espère ne plus jamais vous revoir.
Vous êtes complètement fou.
Ces voix là résonnent encore dans sa tête; un jour, il les avait toutes connues. Et alors il arrive que Yui Valentine se donne des fois l’impression de crever lentement à petit feu. Une douleur qui asphyxie, une mare de souffrance qui assassine et c’est tout son corps qui flétrit dans cet enfer. Et ce liquide âpre qui lui bouche le nez et coule sur le menton.
C’est
assez chaud.
Il y a ce nimbe blanc, irrésistiblement engourdissant… ça y est, ça vient ; sa tête explose, ses membres se déchirent lentement et seulement alors, le noir regagne du terrain sur la couleur épurée. Cette agonie. Il n’avait pas prévu que la mort viendrait si vite à son chevet. Ni la sirène qui va avec.
Il avait juste fallu que la tenancière s’absente quelques minutes pour que tout s’écroule. Le calme s’installant avant la tempête, juste avant que ça vole en éclat, il était encore en train de servir le thé à Ame (‘Amé’) dans un modeste salon à ambiance feutré. Puis brusquement, la tasse de thé entre ses mains a volé en éclat. Et alors que pleuvent les coups et que le temps joue en sa défaveur, Yui Valentine sait dans le fond qu’il n’a jamais vraiment cru pouvoir s’échapper du système. C’est un monde trop petit où la toile est déjà tissée, c’est un monde beaucoup trop petit où il ne reste plus de fil à tirer. Il est déjà trop tard pour tenter une rébellion contre ces deux acolytes envoyé par le régime.
Entre temps, il y a un blanc de passage dans la mémoire de Valentine. Quand il y a tout, rien n’est plus et quand il n’y a plus rien, c’est là que tout se passe ; cela répété en boucle en finit à la conclusion que tout coule et rien ne demeure. Yui Valentine ne sait pas –ou plus pourquoi il a eu ce genre de réflexion à ce moment là.
- Docteur Valentine ?
C’est une voix familière. Terriblement familière dans un contexte si abstrait.
- Ne mourrez pas Docteur Valentine.
Yui a tenu à sourire.
Ha… Ha. Docteur… ? Est-ce que c’était un ordre ? Tout ce qu’il s’est contenté de faire s’est soldé en un flot de sang qui a brusquement jailli d’entre ses dents. Cela dit, ça l’embêterait réellement de quitter ce monde ainsi. Surtout en considérant qu’il était en train de faire conversation à sa cliente dans le salon où il venait fraîchement de se faire embaucher. Pas vraiment glorieux de s’entendre dire par la suite qu’on s’est fait porté par une femme, une femme à facette multiple, une pseudo-cliente qui s’est destinée corps et âme à la résistance contre l’Etat. Une ancienne japonaise qui de plus. Infime détail toutefois assez remarquable pour quelqu’un qui reconnaît avoir un penchant pour les asiatiques.
Ame Tsukiyo avait prit l’habitude de se présenter au salon de thé ces dernières semaines et demandait toujours Yui Valentine. Ils passaient alors quelques heures dans une des pièces de l’établissement et, même perdu dans le Michigan au milieu des lacs à perte de vue, c’était quand même sympa de se retrouver à servir du thé matcha en bonne compagnie.
-
Il valait mieux se mettre à servir du thé que de courir en cavale toute la vie, du moins.
Dans une lettre adressée au Dr Valentine, il est écrit :
(…) Vous êtes un très étrange docteur de la conscience. Un psychologue très bizarre. Merci pour les heures que vous m’avez consacrées. Je ne les oublierai jamais je crois. Ne soyez pas triste, ce n’est qu’un au revoir. Dans un monde que j’espère meilleur... Continuez de porter la blouse, non seulement elle vous va bien mais en plus elle vous fait ressembler à un vrai docteur chez qui on peut se faire soigner. Maintenant, je crois avoir dit tout ce que j’avais à dire dans cette vie.
Sonoko.2196, Sonoko est fatiguée de la vie, c’est en France lors de leur escale entre deux vols qu’elle décide de quitter ce monde pour de bon. Un échec, un autre. Et celui là, il fait encore plus mal. Il la revoit, depuis son hublot.
-
En se brossant les dents, Yui Valentine fixe son sablier dont un côté se vide de sa substance. Il imagine alors ce que serait le monde si ce sable pouvait, au lieu de s’écouler vers le sol conformément à la loi gravitationnelle, s’écouler vers le ciel. Dans ces moments de métaphysique pure, Yui ne peut s’empêcher de sentir des larmes délibérément monter quelque part dans ses orbites, comme un gamin à qui on vient de raconter qu’une vérité n’était pas : Sonoko va mourir, et elle ne lui dira jamais quand. Pourtant, c’est en voulant soigner et faire s’échapper du quotidien cette adolescente brisée dans sa formation d’espion, que Valentine se voit fuir le système. Il est conscient qu’il vient de déclencher un cataclysme qui n’est nul autre que le sien. Au moment où il quitte définitivement le pays du soleil levant camouflé derrière une autre identité, il se dit qu’il est certes un empereur, l’empereur de Rien mais un empereur quand même.
Les jours, mois et années précédant son faux pas, Yui Valentine apprécie de moins en moins la tournure que prend sa carrière. Il reçoit de plus en plus d’enfants devenus ombre d’eux même et la mort qui ponctue le sort de certains d’entre eux commence à lui peser. Il est peut être le roi des illusions –voire même un empereur en devenir, mais considère qu’un empereur ne devrait pas se faire avoir par ses propres illusions. Yui approche de ses 25 ans lorsqu’il assiste ses premières conférences médicales et se déplace dans plusieurs cliniques en Europe pour y échanger expériences et méthodes. Il y rencontrera médecins, psychologues et autres spécialistes de ce domaine. Sans doute là qu’il y distribuera sa carte professionnelle au Dr Alan Oliver sans se douter un jour qu’il se retrouverait face à lui en tant que patient. Ce sont là d’étranges rouages du destin imbriqués les uns dans les autres, mais bien trop petits pour avoir été retenus.
Dans l’institut où il travaille, Yui Valentine a commencé à se faire une place auprès de ses collègues. Son approche singulière de la vie et sa façon de penser -de manière générale, le distingue de ses confrères. En bien ou en mal, c’est là une nuance de subjectivité réduite, et qui par ailleurs ne fait jamais le même avis dessus. Il est relativement jeune sur cette position mais son esprit centré sur les concepts et la jonction de ces concepts défient ses ainés. L’ancien carnet de suivi de formation de Yui Valentine trahit cette intelligence remarquable ; au final l’âge n’apporte rien de plus que la maturité, voire le statut de crédibilité. Cette année là, il commence à avoir ses propres patients inscrits à son nom, tout comme il commence à recevoir les débris d’enfant à la personnalité mâchée par une société machiavélique.
Yui Valentine a 23 ans lorsqu’il rentre dans l’institut médical de la capitale, intégrant une cellule psychologique spécialisée dans le redressement des enfants en échec dans leur formation du programme de la Nation. Il est notamment chargé de décider –toujours en support et assistance de ses mentors, si ses jeunes patients peuvent réintégrer leur cursus où si ils seront envoyés à un destin plus sordide. Avant de se spécialiser dans la psychologie infantile, Yui Valentine a suivi des études de médecine générale dans un des camps de formation japonais. Il commence officiellement sa carrière en tant qu’assistant dans l’évaluation psychologique des enfants quant à leur future formation et domaine de prédilection.
Yui Valentine a été placé relativement tôt dans programme Orphelins de la Nation par ses géniteurs -eux-mêmes issus du même système avant d'être affranchis pour la mise en lumière sur une nouvelle matière permettant de régénérer plus rapidement des tissus organiques abimés. A cette époque là, Yui est trop jeune pour être maître de sa volonté, fragile et indépendant d’instances supérieures, -beaucoup trop supérieures pour pouvoir être contestées. Il y a grandi, forcé puis frayé son propre chemin mais au final, sa seule ligne directrice aura été indubitablement celle de
vivre. Et aujourd’hui encore, en ce moment même ou des fines particules d’eau se mettent à brouiller sa vue et inonder ses vêtements, Yui Valentine se rappelle de ces ruines, ces fragments d’une vie qu’il a toujours essayé de faire sienne.
Ah… Il pleut Valentine. Il pleut.LEVER LE MYSTÈRE
Silence sur Silence
- Pour faire clair:
CE QUI N'A PAS ETE DIT
Entre les lignes
- Yui Valentine est né de parents français eux même Orphelins de la Nation et affranchis des années plus tôt. L’affect ne s’est jamais réellement développé entre eux car il a été placé très tôt dans le même système scolaire que ses géniteurs, au Japon.
- Après ses études, Yui Valentine se spécialise dans la psychologie infantile. Il assiste quelques années ceux qui se chargent de l’évaluation psychologique des enfants et leurs aptitudes à intégrer les formations du régime de fer. Il est jeune, tout comme les autres qui sortent du programme de la nation.
- Il intègre quitte la sphère scolaire pour rejoindre, toujours en tant qu’assistant, un institut médical comportant une cellule psychologique –dite de redressement des rejetons ayant échoué ou dérivé du programme de la nation.
- Entre 23 et 25 ans, il commence à se créer son réseau médical et connaît alors ses propres patients, dans le cadre de remplacement de ses collègues plus expérimentés dans son service. Mais le sort de ses patients commence petit à petit puis très vite à lui peser sur les épaules. Valentine rêve de solutions meilleures, à son sens plus adaptées. La rencontre avec Sonoko, une adolescente âgée de 17 ans à l’époque, ébranle les fondements de sa raison. Sonoko a petit à petit commencé à échouer dans l’évolution de son apprentissage en tant qu’espion pour le compte de l’État et quand il la reçoit, elle est déjà à un stade de dépression trop avancée. Yui Valentine croit en un avenir meilleur, ou du moins, pense qu’il existe toujours un choix. C’est sur cette optique qu’il lui propose de s’enfuir de l’Institut où elle est confinée en attendant de connaître son sort.
- 25 années vécues et Valentine passe d’un statut de partisan à traitre de la nation. Il fuit le pays avec Sonoko dans des conditions les plus illégitimes et suppose intérieurement que leurs têtes sont déjà mises à prix. Yui Valentine est en partance pour la France. Il reste quelques semaines tout au plus sur Paris puis fuit de nouveau, persuadé qu’il est poursuivi. Il l’est. Alors qu’il s’apprête à repartir pour Toronto –conscient que ce sera sa dernière chance de reprendre un vol, Sonoko se suicide dans les toilettes de l’aéroport. Depuis le hublot de son vol qui s’apprête à partir, Valentine n’a vu que les gyrophares des ambulances. Et l’avion décolle.
-A Toronto, Yui Valentine multiplie les petits jobs se mêlant silencieusement à la population. De fil en aiguille il en arrive à travailler dans les abords du Michigan, dans un humble salon de thé. Une de ses clientes récurrentes, Ame, lui sauve la mise de justesse en le rapatriant chez ce fou de Dr Allan Oliver.
-Valentine reste plusieurs mois dans la clinique d’Oliver. Si le contexte avait été autre, Yui Valentine se dit qu’il aurait bien aimé travaillé avec ce type là, à ses yeux
intéressant. Mais la situation étant toute autre, c’est sous le statut de patient que Yui échappe vicieusement à la mort. Pendant sa convalescence, il n’est pas non plus relaté ses crises d’hypocondrie qui pousseront le docteur à lui administrer des calmants pour qu’il arrête de s’enflammer tout seul dans ses délires. Sinon mis à part, Yui ignore tout du Nouveau monde mais ne peut s’empêcher de se poser des questions pour comprendre le pourquoi du comment le docteur tient à sa vie. En fait, Yui Valentine ignorera tout jusqu’au moment où il se retrouvera dans le nouveau monde, une nuit, alors qu’il était censé prendre une radio dans la nouvelle machine qu’Oliver lui avait promise technologique et sur-efficace, car capable d’imager les tissus et les cellules comme jamais. Et si au début du poste, Yui Valentine ferme les yeux, c’est parce que les nuages de ce ciel nocturne qu’il voit au dessus de sa tête ne sont pas de leur couleur naturelle. Le mystère est levé.