-40%
Le deal à ne pas rater :
Tefal Ingenio Emotion – Batterie de cuisine 10 pièces (induction, ...
59.99 € 99.99 €
Voir le deal


Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Empty
Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Empty
Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Empty
Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Empty

Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
MessageSujet: Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness EmptyJeu 7 Juil - 15:29

Une ombre parmi leurs ombres
Féminin

Nokomis C. Shipshaw

Nokomis C. Shipshaw
NOKOMIS C. SHIPSHAW
« Qu'y avait-il à craindre désormais de la mort alors qu'elle avait déjà fait le pire ? »


Âge : 11 ans quand elle arrive sur Terra (hiver de la première année)

Origines - nationalité : Amérindienne et américaine - canadienne

Langues parlées : Anglais, quelques expressions amérindiennes

Reflet : Cheveux longs et d'un noir de jais, des yeux bruns, la peau métissée

Traits particuliers : de petite taille pour son âge ; tâches de rousseau dissimulées sur ses pommettes par son teint de peau




Pseudo Hors-Jeu.
Forty (uiiiiiii).

Où avez-vous découvert Terra ?
Dans les poches de Théodore.

Commentaire particulier.
Je vous aime, aimez-moi !





Mon histoire
Tu as peut-être été beaucoup de personnes différentes, mais ceci est à propos de ce que tu es présentement.
Dis-moi qui tu es et dis-moi comment tu l’es devenu.



Le roulement régulier du train me berce peu à peu. L'angoisse des jours précédents se diluent dans les secondes et, blottie dans les bras de ma mère, je ferme les yeux. Sa présence apaisante, ses bras autour de moi, son parfum, la comptine qu'elle murmure sont autant d'images et de sensations que je grave dans mes souvenirs. Le tambourinement de la pluie sur la toiture de fer nous isole du reste du monde. Il n'y a plus que nous, cachées dans ce wagon de marchandises, en dehors du temps, et rien d'autre ne compte.
J'ai onze ans. Et le château de sable de mon existence vient d'être avalé par les flots. Tout ce que je croyais immuable, éternel, n'est désormais plus que poussière. Sa voix apaise mes plaintes, sa main essuie mes larmes alors même que les siennes dévalent en silence sur ses joues creuses. Il fait froid et nous sommes transies. Je voudrais que mon père soit là. Mais c'est impossible.



Tu recules de quelques pas pour admirer ton œuvre. Les doigts plein d'un mélange d'argile et de pigments, tu traverses la petite salle jusqu'à l'évier en terre. Du pied, tu tires à toi un marchepied de bois et grimpes dessus. Désormais à la bonne hauteur, tu te rinces méticuleusement les mains. Tu peux te permettre ce « gaspillage » d'eau car il a beaucoup plu cet automne et le réseau de gouttières qui jalonne le toit a rempli son office. Dire qu'il y a quelques mois à peine, la réserve était presque à sec. L'été a été dévastateur et le manque d'eau a été la principale source d'inquiétude. Sans qu'ils n'en aient jamais parlé, tu sais que, pour toi, tes parents se sont rationnés.
Tu remets le marchepied à sa place et essuies tes mains sur le devant de ta robe. Il va falloir que tu sortes. Tu préférerais rester à l'intérieur mais il ne reste que quelques braises dans l'âtre et si le feu meurt, l'unique pièce qui vous sert de demeure deviendra bientôt aussi glaciale que la peau d'un mort. Alors tu enfiles tes petits gants mités et ton manteau rapiécé de toutes parts et tu pousses la porte. Il ne pleut plus depuis quelques jours et le vent est tombé mais le froid n'en est que plus mordant. Lorsque tu respires, ton souffle dessine de petits feux follets qui s'échappent dans la lueur décroissante du jour. Tu n'as plus beaucoup de temps avant la tombée de la nuit, tu ne dois pas traîner. Tu tires de son abri un traîneau à ta taille et te diriges vers la réserve à bois. Évidemment, tu ne peux pas prendre les plus grosses bûches et ton père te l'a d'ailleurs formellement interdit, alors tu te contentes des petites. Tu les choisis avec soin : il faut que ce soit du bois dur pour qu'il brûle le plus longtemps possible.
Tu te presses : une fois le feu ravivé, tu pourras mettre le gruau à cuire, ce qui leur évitera d'avoir à le faire en rentrant. Tu souris à cette idée : ils pourront peut-être te raconter une de leurs passionnantes aventures ! C'est ton moment préféré de la journée : la table aura été débarrassée, ta mère te prendra sur ses genoux et passera ses mains dans tes longues nattes noires pour les défaire avant de les brosser pendant que ton père, agile de ses mains, animera ses histoires d'ombres chinoises. Il en raconte tout le temps. Il dit que si tu es si petite alors que tu as presque onze (même Timothy qui en a neuf est plus grand que toi!), c'est parce que tu es née dans la neige. Dès que vous partirez ailleurs, où il fera chaud, tu te mettras soudainement à grandir et tu dépasseras même ta mère. Il en raconte pour tout. Tu souris, tout seule, de toutes tes petites dents. Quand tu ris comme ça, ton visage s'éclaire et on devine sous ta peau matte les tâches de rousseur que ton père t'a légué. Il en a beaucoup. Il dit qu'il en avait encore plus avant mais que, quand tu es née, il a frotté son nez contre le tien et que certaines ont décidé de vivre sur tes joues. Tu voudrais en raconter d'aussi belles. Les tiennes sont encore courtes, c'est pour cela que tu dessines sur les murs, pour remplacer les ombres chinoises que tu ne sais pas encore très bien faire. Ton père dit que tu dois vivre longtemps pour avoir beaucoup de choses à raconter et surtout, tu dois être curieuse. Si tu ne poses pas de questions quand ton père raconte une histoire, il cherche la petite bête et te fait la leçon sur les grands oiseaux, les petits rongeurs, les lacs, les volcans. Parfois, tu le fais exprès, pour qu'il raconte encore.

D'ailleurs, c'est bientôt ton anniversaire ! Tu n'en sais pas la date exacte et t'en fiche : tu es née avec les premières neiges et c'est le seul repère dont tu as besoin. Dès que les températures baissent, tu guettes les petites étoiles de givre qui te disent que la date approche. Ce matin, le sol glacé en était parsemé et ton père, pendant que ta mère vérifiait son paquetage, t'a demandé si, cette année, tu voulais quelque chose de spécial. Derrière tes grands yeux, tu as caché l'image d'une petite boule de poils chaude qui dormirait avec toi, enroulée au creux de ton ventre et as secoué la tête. Tu ne leur diras jamais. Une bouche de plus à nourrir, ce n'est pas pensable. Mais, pour autant, tu sais que tu ne seras pas déçue. Malgré les aléas d'une vie pas facile, ils réussissent toujours à te rapporter quelque chose de fabuleux.
Le ciel s'assombrit de plus en plus. Le gruau chauffe lentement au-dessus des braises et tu le touilles de temps en temps pour qu'il n'accroche pas au fond. Tu as pu y ajouter quelques tubercules récupérées dans le jardinet à l'arrière de la maison. Consciencieuse, tu as aussi dressé la table. Ils ne tarderont plus maintenant car les lumières illuminent les allées principales, là-bas, dans le village. Alors tu attends.




Elle s'est endormie. Sa respiration soulève sa poitrine où repose ma tête et me donne l'impression d'être en mer. D'entre ses lèvres s'échappe le vent qui gonfle nos voiles et nous emporte au loin. Là où personne ne pourra plus nous faire de mal.
Le bruit me tire des songes peu joyeux dans lesquels j'ai fait naufrage. Je devrais lui en être reconnaissante mais il ressemble tant aux cris d'un mort que je suis en sueur à peine consciente. Sous moi, il n'y a plus qu'un tissu rêche qui agresse ma peau. Je panique. Mais elle est là. « Le train ralentit. » Elle n'a pas besoin d'en dire plus, je connais la suite de notre programme. Elle attrape ma main tremblante et m'entraîne jusqu'à la grande porte de métal qui nous sépare de l'extérieur. Je l'aide à la pousser, m'arc-boutant de tout mon petit corps. Le vent fouette mon visage alors que je cherche à voir. Plus si loin maintenant, les lumières de Chicago se confondent avec les premières lueurs du jour. Nous n'avons pas de temps à perdre : il nous faut quitter le train avant qu'il n'entre en gare. Parce qu'elle m'a raconté, je sais qu'ils seront nombreux à nous attendre, aussi bien à quai qu'alentours. Ses bras me soulèvent du sol et m'enserrent. Je n'ai que le temps d'affirmer ma prise qu'elle saute. Et les secondes se figent.
Devant mes yeux défilent à vive allure les wagons gris qui nous transportaient et dans les bris de lumière, j'aperçois des hommes et des femmes dont la destinée file vers Chicago sans même qu'ils ne se doutent de notre présence. Le choc de la réception m'arrache un cri et j'ai peur de tomber mais c'est à peine si elle relâche son emprise avant de se mettre à courir. Nous l'avons fait.



Tu as attendu longtemps. Le plus longtemps possible. Mais le sommeil a fini par remporter la bataille et tu dors maintenant, la tête reposant sur tes bras frêles, ton assiette à peine repoussée vers le centre de la table. Dans l'âtre vivotent les dernières braises. Et c'est ce qui te réveille : la baisse de température. Tu frissonnes, tu t'étires. Dans la pénombre naturelle de la maisonnette, il te faut plusieurs minutes pour réaliser qu'ils ne sont pas rentrés. Ce n'est qu'alors que la panique s'empare de toi.
Un vent glacial t’accueille aussitôt le seuil passé. Sa caresse te traverse de part en part, peu vêtue comme tu es. Mais tu t'en moques. Tes parents ne sont pas rentrés et rien, rien ne peut être pire que cela. Tu voudrais voir leurs silhouettes se découper dans le brouillard là-bas, que ton père courre vers toi pour t'envelopper dans son grand manteau, que ta mère te réprimande d'être sortie pratiquement nue. Mais il n'y a personne au bout du chemin. Et les larmes que tu ne réussissais qu'à grand peine à contenir brûlent désormais tes joues glacées.
Tu te pelotonnes dans la grande couverture en frissonnant. Tu as changé ta robe glacée et humide pour un vieil ensemble en coton râpeux mais sec. Tu aurais voulu rester là-bas dans le froid et peut-être bien mourir. Tu renifles et écrases contre ton bras les dernières larmes qui nichent au bord de tes yeux. Ils ont eu un contre-temps, c'est tout. Bien que cela ne leur soit jamais arrivé, cela ne voulait pas dire que c'était impossible! Et il est hors de question qu'ils te trouvent ainsi en rentrant, tu n'as plus cinq ans ! Tu poses ton menton sur tes genoux et affrontes la pénombre du regard. Après de longues minutes, des heures peut-être, un son à la fois familier et étrange t'interpelle. Le plancher grince.




Elle brûle la carte sous mes yeux et nous attendons qu'il n'en reste que des cendres. Ses tracés voilent mon regard comme marqués au fer rouge sur ma rétine. Tout Chicago dort encore, sauf ceux qui nous veulent du mal. Son visage, mortellement sérieux, écorche les regards qui s'y égarent. Je ne l'ai jamais vue ainsi. Étrangement, j'ai la sensation que c'est ce qu'elle est vraiment.
À force de rester attentive, au moindre bruit, à la moindre lueur ou ombre mouvante, mes yeux piquent. Je voudrais dormir : je ne cesse d'espérer que tout reviendra à la normale lorsque je me réveillerai. Car tout cela ne peut être qu'un rêve. Perdue dans ces fantaisies, je la percute de plein fouet. Plusieurs mètres devant nous se tiennent des hommes. Ils sont ou plutôt ils semblent avachis comme des hommes qui auraient trop bu mais c'est nous qu'ils attendent. Je voudrais rebrousser chemin, changer de rue, prendre un autre embranchement. Si on revenait au précédent carrefour, en prenant à droite jusqu'au prochain grand boulevard, on pourrait... Elle m'attrape la main, m'interdisant toute fuite. Tout mon corps se tend : il va falloir courir et ma vie en dépend. Et mon cœur bat à tout rompre.



Tu ne sais plus comment vous êtes arrivés là. Tu se souviens de la peur, de l'ombre gigantesque, du hoquet qui s'est étouffé dans ta gorge. Et puis, c'est le trou noir. Mais lorsque tu émerges, c'est sa voix chaude qui t'enveloppe, presque aussi bien que le manteau dans lequel il t'a enfoui. Tu t'y pelotonnes comme le chaton de tes rêves : ils sont là, tout va bien. Sa grande main te caresse les cheveux. Elle sent le fer, la rouille. Tu veux dormir encore, maintenant que l'angoisse t'a quittée mais, comme s'il avait senti, il t'attire contre lui et te redresse. Ses grands yeux bleus te dévisagent, graves mais souriants, d'un sourire triste, sans joie. Une estafilade déchire sa peau claire parsemée de taches de rousseurs. Quelque chose ne va pas. Tu tournes la tête vers ta mère et c'est encore pire. Sa jupe est déchirée de bas en haut le long de sa jambe gauche et, sous le long manteau qu'elle porte comme une carapace, tu devines son corsage en lambeaux. « Que s'est-il passé ? » Il te tend à elle et tu te réfugies dans ses bras. « Pourquoi tu pleures ? » Elle te serre contre elle comme si tu allais disparaître. Et ils te racontent tout.
Comment ta mère a été élevée comme une esclave et jetée dans le Programme comme une moins que rien, deux ou trois échelons plus bas que les plus bas de l'échelle dans la hiérarchie, juste parce qu'elle avait ces traits, encore reconnaissables, de 'pourriture indienne'. Comment elle les a gravi à la seule force de ses bras. Comment elle a rencontré ton père. Comment ça a changé sa vie. Leur vie. Comment ils ont fuit ce qu'ils appellent le Régime de Fer pour se réfugier ici, quelque part, perdus dans le Grand Canada. Comment ils se sont liés à un petit groupe de résistants, leur donnant tout ce qu'ils savaient de l'organisation, de la hiérarchie, des tâches de chacun, tout. Comment tu es née et ce que ta venue au monde a changé. Et pour finir, comment, après quinze années de paix royale, ils les, vous, ont retrouvés.
Tu ne sais pas quoi dire. Dois-tu dire quelque chose ? Y a-t-il seulement quelque chose à dire ? Tu as l'impression de tomber dans un gouffre sans fond tant ta vie, ce que tu croyais tangible et acquis, ne te donne plus que l'impression d'être une mascarade, un mensonge. Cela a dû se voir sur ton visage, au travers des doigts que tu tords sans t'en rendre compte car ce ne sont que mots d'amour, baisers et caresses qui s'en suivent. Tu es leur trésor et tu es la seule chose qu'ils ont peur de perdre.




Le bruit que fait mon cœur résonne dans mes oreilles et c'est à se demander comment Chicago n'est pas réveillée toute entière par son tambourinement. Je n'entends plus rien d'autre que son rythme effréné et l'air sifflant qui se trace un passage jusqu'à mes poumons. Garder le rythme et la tête haute, les sens en alerte. La suivre, ne pas la lâcher des yeux. Et derrière nous, en écho à mon palpitant, l'éclat de leur course sur les pavés.



Le sommeil qui t'a emportée a balayé tes peurs, te laissant souriante au creux de ses bras. Tout cela n'est-il donc qu'un rêve? Les paysages qui défilent sous tes yeux ne te rappellent rien, aurais-tu tout imaginé ? Mais leurs voix te parviennent, de plus en plus clairement. Attrapant au vol quelques mots tu demandes qui est Henri, la bouche pâteuse. Le résistant qu'il te décrit paraît grand et musclé, barbu aussi. Un peu comme lui. Il va vous aider à échapper à la Garde de Fer en vous menant à un docteur. Tu vois mal comment un médecin pourra vous sauver mais, à travers ses mots, il semble digne de confiance. Tu la sens sceptique mais elle ne dit rien. Elle se contente de te caresser le front d'une main fraîche et rassurante. Bien réveillée maintenant, tu te redresses pour mieux voir. La voiture qui vous emmène vers une nouvelle vie va cahin-caha sur la route à peine carrossable. De temps en temps, tu perçois la voix du cocher qui stimule son cheval. Tout est nouveau au-dehors. Il y a longtemps que les grands arbres ont disparu car tu ne vois que de la plaine à perte de vue. Au loin, sur la ligne d'horizon se dessinent d'imposantes masses sombres d'où s'échappent de longues cheminées de fumées pour rejoindre les cieux. Tu les suis du regard jusqu'à te perdre dans les nuages gris. Il neige.
Il neige ! Tu es encore accrochée à la boiserie, émerveillée, lorsqu'il t'interpelle. Il sort de sa poche une longue chaîne brune que termine un médaillon de cuivre finement ouvragé. « Joyeux anniversaire. » Tu le prends timidement, comme un animal fragile. Tu sens sous tes doigts, en creux, trois lettres bien droites : N. C. S. Tes initiales. C'est ta montre, ton bijou, ce que tu possèdes de plus précieux désormais. Tu découvres une petite encoche proche de l'attache et, d'un coup d'ongle, l'ouvres. Une montre se dévoile à tes yeux : sur le premier cercle noir comme la nuit se détachent les chiffres romains en dorures, au centre, là où prennent naissance les fines aiguilles qui égrainent le temps, tu aperçois les rouages de cette machinerie méticuleuse. En l'approchant de ton oreille et en retenant ton souffle, tu peux même entendre le faible cliquetis qui l'anime. Tu t'empresses de passer la chaîne autour de ton cou. Le contact du métal froid contre ta peau te fait frissonner mais tu es trop heureuse pour t'en soucier. Tu l'embrasses avant de te jeter joyeusement dans les bras de ta mère. Tu t'apprêtes à dire quelque chose lorsque tu es propulsée en avant. Dehors, le cocher hurle.




Le bruit de leurs pas s'éloigne et elle soupire, relâchant la pression sur ma main, presque broyée par la peur qui nous tord le ventre. Elle crache une gerbe de sang brunâtre avant de s'essuyer la bouche. Je n'ose rien dire. J'ai un peu honte aussi. J'aurais pu l'aider, prendre cette barre de métal qui traînait dans la boue et l'abattre sur eux. Mais au lieu de cela, tremblante, je me suis fait petite, j'ai longé les murs, j'ai fui. Le sourire qu'elle m'adresse m'apaise. Un peu. Pas assez. Elle prend ma main et, dans le silence, nous reprenons notre route. Les rues inconnues et hostiles ramènent mes pensées à notre maisonnette sans prétention, ces quatre murs qui ont été mon univers jusqu'à présent. Une éternité semble s'être écoulée depuis que nous sommes partis. Une éternité qui ne nous mène qu'aux Enfers.



Tu as peur de fermer les yeux, ne serait-ce que pour chasser les larmes qui ne cessent d'en couler. Chaque minute t'éloigne de son corps, de son cadavre. Tu as du mal à intégrer que plus jamais il ne te serrera dans ses bras, plus jamais ses grandes mains calleuses ne dessineront d'oiseaux sur les murs, plus jamais son rire ne résonnera à tes oreilles. Tu as l'impression qu'on t'arrache le cœur pour ne laisser à la place qu'un vide immense et amer. Ton seul réconfort, le dernier pilier de ton existence, est derrière toi, comme une ombre rassurante, et sa présence te maintient en selle à chaque foulée du cheval qui, libéré de ses entraves, t'emporte loin, loin en crachant dans un sifflement métallique une écharpe de fumée blanche..



Un long cri m'échappe alors que je matraque ses épaules, son dos, sa tête de toutes mes forces. Il s'écroule, enfin, mais je ne peux m'arrêter. Mes mains martèlent son visage et il faut qu'elle me ceinture pour que je m'arrache enfin à la transe qui m'emporte. J'ai les jointures douloureuses et rouges. D'un sang qui ne m'appartient pas. Je réalise alors que j'en ai jusque sur le visage et j'ai beau frotter mes joues avec l'énergie du désespoir, la sensation poisseuse qui s'y accroche ne s'en va pas. C'est la troisième embuscade que nous ne pouvons éviter et la fatigue, les nerfs, la peur m'ont envahie comme un démon. Je titube en arrière, cherche à fuir le regard accusateur et vide qui me fixe sans gêne. Dans ce visage pâle et immobile que la mort emplie peu à peu, je revois celui de mon père. Il crache ce liquide brun, ce sang qui souille son menton pendant que de son ventre s'extirpe une lame noire et il hoquette, dernier son qui s'échappera à jamais d'entre ses lèvres. Elle me secoue et il redevient cet homme, cet enfant à peine plus vieux que moi et qui ne vieillira plus. Par ma faute. J'essaie de me relever mais le monde tourne, les étoiles rencontrent le sol et je...

∞ | ∞


« Calm down, the wound... »
(« Calmez-vous, la plaie... »)
- bruits de lutte, gémissements retenus -
« I won't ! I won't until she's safe ! Send her there ! »
(« Non ! Je ne me calmerais pas tant qu'elle ne sera pas en sécurité ! Envoyez-la ! »)
- bruits sourds, raclement sur du bois, cri de surprise -
« Fine. I will send her. »
(« Très bien. Je l'enverrai. »)
- silence -
« I will ! If you just let me... OKAY ! »
(« Je le ferais ! Si vous me laissez juste... OKAY ! »)
- bruits de pas, porte qui claque, silence - trou noir.

- vrombissement lointain, éclat lumineux -

- silence -

∞ | ∞

« Je me suis réveillée seule. Je me rappelle encore ma peur. Je ne me souvenais de rien, sauf du visage de l'enfant que j'avais tué. Il me hantait. Où était ma mère ? Je suis restée là plusieurs jours à l'attendre. Il faisait froid, tellement froid. Il a fallu que je me cherche un abri. J'ai divagué, marché longtemps, jusqu'à trouver les arbres. Sous leurs branches, il faisait moins froid. Je crois bien que je voulais mourir tu sais. J'étais convaincue qu'elle était morte et sans elle, sans mon père... Mais il faut croire que j'étais plus forte que ça. Ou que la forêt m'a épargné pour un temps.
Avec le recul, je sais qu'elle l'a fait. Je n'ai croisé aucune bête sauvage cherchant à me manger pendant des mois. J'ai pu "m'installer" au creux de quelques branches, me confectionner un abri de fortune dans de la neige.
Dès lors, les choses sont plus floues et se mélangent un peu. Les mois on passé, la neige a fondu, la forêt à changé. J'ai dû survivre : tuer ou être tuée.
Le temps a disparu. On ne le compte plus quand on est seul. Il est, c'est tout. On se sert de repère plus souple : le beau ou le mauvais temps, la lutte des mâles, la naissance des petits... Je me suis adaptée à la forêt : j'ai suivi ses habitants pour apprendre quoi manger, où boire. J'ai couru les bois. J'ai appris à chasser. Je n'ai pas eu le choix. Et puis, il y a eu ces nouvelles bêtes. Vous. Les bipèdes. Les humains. De plus en plus nombreux, à sillonner de plus en plus les sentiers. Comme tout ce qui est inconnu, je vous ai évité. Regardé de loin, de haut. Nous avons cohabité longtemps sans que vous le sachiez.
Jusqu'au jour où l'un d'entre vous m'a surprise, attaqué. Je l'ai tué. Ce fut facile, je l'avais déjà fait. Ne fais pas cette tête, tuer ou être tuée, tu te souviens ? A partir de là, comme s'il vous avez donné le mot même mort, vous n'avez pas arrêté d'interférer dans mon monde. Vous êtes entré chez Elle, Elle a dévoré l'une d'entre vous. Elle vous aurait tous mangé. C'est moi qui vous ai sauvé. Tu me jugeais plus tôt pour la mort d'un homme, vos vies ne compensent-elles pas ?

Je ne sais pas pourquoi je suis ici. Tout était plus simple là-bas.
»

Transcription écrite retrouvée dans la bibliothèque d'Ashton






Inventaire au moment du départ
Qu'avais-tu avec toi lorsque le docteur t'a abandonné dans la nature sauvage : avec quoi commences-tu ton aventure ?


Lorsque les sacs furent préparés, celui de Nokomis contenait :
    - une couverture
    - des vêtements de rechange
    - un couteau (cadeau pour ses 9 ans)
    - une petite bourse ronde en bois à accrocher à la ceinture (cadeau pour ses 10 ans)
    - sa montre-sautoir (cadeau pour ses 11 ans)

Lorsqu'elle reprend connaissance dans le Nouveau Monde, son paquetage comprend en plus :
    - des fruits, frais et secs
    - de la viande séchée
    - un deuxième couteau, plus long
    - une gourde en bois



Inventaire actuel
Qu'as-tu réussi à accomplir depuis que tu es dans le Nouveau Monde : quels sont les outils qui t'ont permis de te rendre jusqu'ici ?


Les possessions (ne comprenant pas les réserves de nourriture) de Nokomis en cet été de l'an 5 se résume à :
    - des vêtements en lambeaux
    - trois couteaux : le petit de ses 9 ans, celui légué par sa mère, plus long, et un couteau simple récupéré sur un mort
    - sa bourse en bois contenant sa montre-sautoir ainsi qu'un médaillon récupéré sur le même mort
    - la gourde en bois de sa mère ainsi qu'une autre en cuir récupérée sur le mort mort
    - une parure de crocs : collier, couteau taillé dans une canine attaché à son poignet, fourre-tout dans les cheveux
    - un arc tout simple et des flèches bricolés récemment




Dernière édition par Nokomis C. Shipshaw le Dim 10 Juil - 8:48, édité 7 fois
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness EmptyVen 8 Juil - 5:10

Faire tenir l'infini dans la paume de la main, et l'éternité dans une heure
Féminin

Lune Escher

Lune Escher
Oh mais c'est que cette histoire m'a fait monter les émotions au visage.
Bon, je ne suis plus modératrice depuis longtemps, mais je suis quand même assez curieuse de savoir ce qui se passe pour elle dans le Nouveau Monde entre son arrivée et maintenant... Est-ce c'est en construction? <3
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness EmptyVen 8 Juil - 19:14

Une ombre parmi leurs ombres
Féminin

Nokomis C. Shipshaw

Nokomis C. Shipshaw
Merciii !

Et oui, c'est en construction, je n'ai pas encore trop travaillé cette partie-là, il faut que je me penche dessus ^^
Revenir en haut Aller en bas
MessageSujet: Re: Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness Empty


Contenu sponsorisé
Revenir en haut Aller en bas

Nokomis C. Shipshaw ~ Wilderness

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut

Sujets similaires

-
» Nokomis ~ Sous les ombres
» Nokomis ~ Montrez patte blanche pour éviter ses crocs
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Terra  :: Préambule :: Registre :: Fiches validées-