Mon histoire
In the streets of Mexico ~
«
Don't worry mom, I'm gonna take care of you. We're gonna make it, together. Hey, understand ? Together. »
C'est ce discours, à quelques différences près, qu'avait toujours tenu Adam depuis que sa mère et lui avaient fuit les États-Unis. Une histoire guère originale, j'en ai peur. Pour se soustraire au joug d'un mari violent, Mme Palmer avait immigré clandestinement au Mexique avec son fils alors âgé de quatre ans. Elle avait à la Capitale quelques cousins éloignés et des ombres éparses d'une famille éclatée qui balançait depuis toujours entre la frontière des deux pays. Pour une mère monoparentale qui travaillait tantôt au noir, tantôt comme bonne de service, l'aspect financier de leur vie n'était pas éclatant. Adam n'eût donc pas la chance de fréquenter bien longtemps les bancs d'écoles. Pas qu'il allait s'en plaindre. L'établissement l'aurait foutu à la porte de toute façon.
◊
«
No te vuelvas sin traer el dinero, cabrón ! »
Que fait un jeune sans éducation, sans salaire et en colère contre le monde entier ? Il fait l'imbécile, quelle question. Adam était un enfant futé et autodidacte, aussi n'eût-il aucun problème à ajouter sa part à celle de sa mère même si ses moyens de faire restaient douteux. Mme Palmer craignait toujours de retrouver son fils dans le fond d'un caniveau, la gorge tranchée. Peur fondée. Adolescent, le jeune homme enchaînait les boulots en tout genre, ceux qui nécessite une déclaration d'impôts et ceux qui se font sous la table. Il se débrouillait bien pour ce qui était de s'attirer des ennuis mais aussi pour ce qui était de s'en débarrasser. Si un jour vous vous demandez d'où le corbeau tient son endurance incroyable à la course, c'est tout simplement qu'il a beaucoup trop usé de ses jambes dans les rues de Mexico pour semer ses ennuis.
Anarchiste dans l'âme, contestataire endurcit dans le coeur mais beaucoup trop impétueux et irresponsable pour intégrer les rangs de la Résistance, Adam se contentait de suivre leurs actions d'un oeil extérieur. Il se plaisait à croire qu'il faisait partie de l'organisation et agissait en solo, posant ça et là des gestes complètements dénués de sens, des actions qui n'avaient comme but que de perturber l'ordre publique. Palmer se plaisait dans la peau du mouton noir et de l'agitateur. Seulement on ne vit pas dans la provocation sans récolter les réactions.
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- Reviens ici, bâtard !
Adam s'était trop approché du hangar dissimulant les activités d'un groupe de résistants. Curiosité, mauvaise indiscrétion. Il s'était déjà fait reviré un nombre incalculable de fois et, ce soir, l'homme qui le pourchassait semblait bien décidé à ne pas le laisser filer. Dommage, le corbeau connaissait les méandres de Mexico comme le fond de sa poche pour y avoir trop longtemps flâné. Les ombres se coursaient comme deux chats de gouttières et, dans un bruit de bottes et de souffle court, dérangeaient à peine l'agitation singulière du night life. Palmer se disait justement que l'autre con était tenace lorsque ce dernier lui mit la main dessus, parvenant plus ou moins à le plaquer maladroitement contre la parois d'un immeuble. Le jeune homme fit mine de tirer un couteau de sa poche mais la pression d'un canon froid sur sa tempe l'en dissuada. Le poursuivit et le poursuivant reprirent tant bien que mal une quantité recommandable d'oxygène avant que le silence ne soit brisé.
- Je reconnais ta tête de petit con.
- Je suis flatté. Les affaires vont bien ?
On lui écrasa la joue contre la brique du mur, violence insuffisante pour lui enlever ce sourire arrogant du visage.
- On veut pas de toi dans la Résistance, t'es incapable de suivre un ordre simple. Deux de mes hommes sont morts à cause de tes conneries, je devrais te mettre un balle dans la cervelle et on en parlerais plus.
- Moi j'en envie d'en parler.
- Ta gueule Palmer.
- Donne moi une autre chance. Je veux faire un truc, n'importe quoi. Dis et je fais.
Le corbeau voulait aider la Résistance ? Très bien. On avait un dernier job pour lui mais on se garda bien de lui préciser en détail de quoi il en retournait. Plus pour fuir la bouche du pistolet contre sa tête que pour se rendre réellement utile, Adam accepta de se rendre au Michigan chez un certain Oliver. Apparemment ce travail lui rapporterait gros et c'est en promettant à sa mère de revenir avec un montant d'argent honorable qu'il quitta le Mexique pour les Amériques, sa terre d'origine. La regagner ne fût pas de tout repos mais, de contacts en contacts, c'est un Résistant qui lui fit passer la douane dans le plus grand des anonymats.
◊
Palmer martelait la porte depuis environ cinq longues minutes quand le Docteur vient entrouvrir, visiblement agacé de se faire déranger à cette heure.
- La clinique est fermée...
- C'est toi Oliver ? C'est Lorenzo Sanchez qui m'envoit. Il dit qu't'as un travail pour moi.
Pas une, pas deux, Adam se retrouva assit dans un local pour une série d'examens barbants auquel il se plia non sans poser dix milles questions. Compte tenu de l'heure, Dr. Alan semblait peu enclin à répondre à un moulin à paroles et se contenta de conclure rapidement en lui enfonçant une aiguille dans le bras. Le jeune homme envoya valser la seringue dans un juron.
- C'est bon putain, j'ai pas le choléra !
- On t'a dit quoi en t'envoyant ici ?
- Que j'allais gagner plein de pognon.
Oliver lui semblât être blasé et surpris à la fois, une combinaison assez incongrue sur un visage humain.
- Tu penses quoi de notre société ?
- Qu'elle est pourrie jusqu'à la moelle, répondit aussitôt Adam comme si le Docteur lui avait mis les mots sur la langue
Il n'en fallu pas plus pour qu'une décision soit prise. C'était d'ailleurs assez déroutant de penser que le destin d'un seul homme allait se solder suite à une combinaison fortuite de mots. Palmer suivit Oliver jusqu'à son drôle de sous-sol et ne s'étonna pas lorsqu'il lui demanda d'entrer dans sa machine étrange, croyant à une énième série de tests. Il râla pour la forme lorsqu'il lui interdit le métal, se débarrassant de sa ceinture et de quelques percings. Avant de refermer la porte, le Docteur lui balança son sac de voyage dont-il avait préalablement fouillé le contenu. Il y avait retiré quelques éléments inutiles à son périple, comme une liasse de billets , une canette de peinture, des clefs...
- Tu veux que je foute quoi avec ça ! cria Adam pour se faire entendre derrière la parois de l'appareil
- Bon voyage !
Une rainure lumineuse grossit à l'intérieur de l'habitacle, engloutissant son passager, et Oliver pu retourner se coucher.
Inventaire aka tout-ce-qui-était-dans-son-sac-à-dos
- Des vêtements de rechange
- Une paire de running shoes
- Un jacket
- Une bouteille d'eau
- Des sticks de Jerky
- Un canif à cran d'arrêt
- Un pad de post-it et un crayon à mine