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| Petite nostalgie d'un monde pourri | |
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Sujet: Petite nostalgie d'un monde pourri Mar 28 Juil - 23:19 | |
| Pionnier
Robin Lunde | Carl Johnson avait joué de ses connaissances et pouvoirs pour faire monter Robin et Anna dans un avion transportant des armements vers l'Amérique. De l'autre côté de l'Atlantique, les deux sœurs ont été accueillies par le Dr Oliver qui effectua quelques examens sur leur personne. Satisfait, il leur expliqua les procédures et le but de son projet. Les sœurs Lunde acquiescèrent. Pouvaient-elles faire autrement que d'accepter ces termes en échange de la liberté ? La dernière chose qu'elles aient vue de l'Ancien Monde sont les salles de recherche du Dr Oliver.*** Mes doigts se referment solidement sur ceux de ma sœur. Nos mains jointes se tiennent avec tellement de fermeté que je les crois inséparables. Je nous crois inséparables. Je n'entends plus que le son de mon cœur qui se débat comme s'il voulait sortir de ma cage thoracique. Ma main libre se pose sur ma poitrine, le sent battre, appuie dessus comme pour le calmer. S'il continue, il va se fatiguer. Ou exploser. Et j'en ai encore besoin, de ce cœur, pour pomper mon sang quand je serai dans l'autre monde. J'observe une dernière fois ce qui m'entoure. J'ai lavé des salles comme celle-ci pendant des années. J'ai récuré des planchers, des murs, des tables comme celle-ci pendant si longtemps. Tout était si simple, si facile. Je faisais mon travail, j'empruntais des livres de médecine et je rentrais chez moi les étudier. La vie me paraissait fade et sans saveur, sans buts ni sans rêves. Mais aujourd'hui, je sais qu'elle m'était confortable. Appréciable. Douce. Nostalgie. Nous traversons la brèche. Personne ne sait ce qui se trouve de l'autre côté, car personne n'en revient jamais. Une fois traversé, il n'existe aucun retour possible. On ne peut plus changer d'idée, on ne peut plus reculer. On ne peut qu'avancer. De toute façon, cela fait maintenant plus d'une semaine qu'Anna ne peut plus reculer. Le gouffre derrière elle la poursuit, l'empêche de regarder derrière elle en quête de solution. C'est la brèche ou la mort. Le choix est facile pour nous. La lumière est si vive, si forte, que je ne vois plus rien. Je ferme les yeux, aveuglée. Je n'ai aucun autre sens qui semble fonctionner. Je ne sens plus l'odeur de produit nettoyante. Je ne vois plus la salle immaculée. Mes pieds ne touchent plus le sol. La seule chose qui me raccroche encore à l'univers matériel est la sensation de la main de ma sœur dans la mienne. Je la sens toujours aussi fermement accrochée à la mienne et ça me rassure… jusqu'à ce qu'elle disparaisse. Mes doigts se referment sur du vide, puis ma main s'ouvre toute grande à la recherche de celle d'Anna. Où est-elle ? Le monde me revient petit à petit. Je sens mes pieds retrouver un appui et les herbes me chatouiller les chevilles. La lumière est toujours vive, mais plus au point de m'aveugler. Et l'air. L'air est tellement différent. Beaucoup plus pur, beaucoup plus agréable à respirer. Mes poumons s'en emplissent et s'en délectent. L'odeur de l'herbe, des arbres. L'odeur de la nature. C'est cet air si pur qui gonfle mes poumons lorsque je crie. « ANNA ?! » J'ouvre les yeux d'un coup. Je suis affolée. Je cherche Anna avec mes yeux, mes mains... Avec tous mes sens en alerte. Où est-elle ? Elle n'est pas à mes côtés, je ne sens plus sa présence. C'est comme si elle n'avait jamais existé. Est-elle restée de l'autre côté ? Et si elle avait eu trop peur pour traverser ? Peut-on reculer au dernier moment ? Pourquoi ne m'a-t-elle pas emmenée, où qu'elle soit allée? « ANNA ? ANNA, OÙ ES-TU ? ANNA ? » Je crie comme un animal apeuré, blessé, détruit. Je crie avec toute l'énergie qu'il me reste. Toute la peur, la panique, la colère qui m'habite se mêlent pour projeter ma voix si forte. Je regarde partout, de tout côté, vers tous les horizons. Où es-tu Anna ? |
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Sujet: Re: Petite nostalgie d'un monde pourri Jeu 20 Aoû - 10:34 | |
| Eye Of The Tiger
Théodore Lefaucheux | Je passais mon doigt sur le bois pour vérifier s'il était sec. Clair, veiné d'un brun acajou, il avait absorbé toute la graisse dont je l'avais couvert. Je m'étais lancé dans la fabrication d'un panneau pour indiquer la direction de nos abris aux nouveaux venus. Après quatre ans, il était peut-être temps qu'on arrête d'en perdre, les envoyant pour certains au-devant d'une mort certaine. Mon panneau était rudimentaire, composé d'uniquement deux pièces : le piquet et le panneau directionnel. Avec les moyens du bord, j'avais fait un panneau tout à fait respectable. Les deux pièces s'emboitaient, le directionnel reposant sur une partie moins dégrossie du piquet qui le maintenait à la bonne hauteur. D'un peu d’ingéniosité, de la patience et un couteau commençait à naître un précieux savoir-faire, d'autant plus indispensable que j'avais pour ambition d'agrandir la modeste hutte de Lola maintenant que nous étions trois. Une fois les deux pièces assemblées, j'admirai une nouvelle fois mon œuvre. Il fallait l'admettre, c'était du bon travail. Je m'étais longuement demandé ce que je devais y inscrire. Après tout, même si la langue la plus fréquemment parlée était l'anglais, tous ne la maîtrisaient pas et d'aucun pouvait même ne pas la comprendre. En définitive, j'avais coupé la poire en deux : le mot "village", lisible aussi bien en français qu'en anglais, accompagnait d'élégants pictogrammes de ma composition, une maisonnette et un grand feu. Cela m'avait demandé pas mal de travail préalable car, ne boulait pas tout gâcher d'une main hésitante, je m'étais d'abord entraîner sur des chutes de bois. Et enfin, il avait fallu que je vois avec Yui si certaines plantes pouvaient me servir d'encre. Quelques jours de recherches avaient été nécessaire pour arriver à un résultat un peu gras qui tiendrait mieux les aléas du temps. Impatient de le voir en pleine action, je le chargeai sur mon épaule et pris la direction du champ de pierre.
Je n'étais plus très loin lorsque surgit l'éblouissante lumière annonciatrice qui menace de me brûler la rétine tant j'en étais proche. Je me hâtai : les nouveaux arrivants étaient rares ces dernières temps et je portais encore le panneau qui le guideraient jusqu'à nous. Après quelques minutes, j'entendis un cri. C'était un cri déchirant, qui se répétait, enflant à mesure que je m'approchais, que je pressais le pas. Je tombai nez à nez avec un être frêle qui n'était plus que le hurlement qu'il poussait. Son visage se décomposa à ma vue avant de parcourir à nouveau l'étendue vide qui nous entourait, cherchant de tous les côtés cette Anna qui n'était nulle part. Les larmes semblaient prêtes à affluer au bord du précipice de ses joues mais elle les ravalait, fière. Était-ce parce qu'elle ressemblait à cette petite chose pleine de colère et de voix que je tenais il n'y a pas si longtemps encore que je ne pus m'empêcher de tout lâcher pour l'envelopper de mes bras ? Elle paraissait si fragile avec sa taille mince et sa peau d'albâtre qu'elle pourrait se briser sous mes doigts. Doigts que je n'osai serrer et dont elle s''échappa avec facilité, les yeux hagards, les lèvres essaimant aux quatre vents le prénom tant chéri. .
Dernière édition par Théodore Lefaucheux le Sam 9 Juil - 12:26, édité 1 fois |
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Sujet: Ven 11 Sep - 17:02 | |
| Pionnier
Robin Lunde | Ma gorge en feu me supplie d'arrêter de crier si fort. Je m’époumone à ce point où je manque d'air, je suffoque et je m'en fous. Je dois retrouver ma Anna, ma si précieuse Anna. Elle n'est plus là, elle a disparu, volatilisée dans cette lumière blanche qui me l'a enlevée. On m'a arrachée ma Anna. Qu'a-t-il bien pu lui arriver? J'ai perdu connaissance du monde réel, plus rien n'existe pour moi que le vide qui s'installe en moi, me déchire et qui n'en finis plus de grandir. Je ne pleure pas. Je suis probablement beaucoup trop occupée à crier pour que mon corps consacre de l'énergie à autre chose. Je tombe à genou dans l'herbe si verte du champ. À ce moment, je n'ai pourtant toujours pas remarqué à quel point l'endroit est magnifique. À quel point le soleil brille fort, les oiseaux chantent gaiement, à quel point tout semble si paisible. Il n'existe à ce moment rien d'autre que ma perte.
Quelqu'un s'approche alors que ma voix s’affaiblit. Je n'arrive plus à crier aussi fort qu'au début et la douleur m'apprend que si je continue, je cours vers une extinction de la voix. Je lève mon regard vers l'inconnu; un homme à l'apparence gentil, pas menaçant, que je ne vois presque pas. Malheureusement pour moi, pour lui, pour nous, je ne veux personne d'autre que ma sœur.
Il m'enveloppe dans ses bras doucement, comme si mon apparence frêle lui indiquait que je pouvais me briser sous le poids de son étreinte. Je suis déjà brisée au plus profond de moi et la douleur physique ne me fait pas peur. Il peut me plier en deux s'il le veut, je ne me débattrai pas, j'accepterai la douleur avec un certain plaisir. Je peux bien mourir aussi; sans ma Anna cela ne sert plus à rien de vivre. Je finis par me défaire de ses bras, le repousser presque doucement. Je refuse cette étreinte et cette chaleur dont je ne me sens pas méritante. Je ne peux pas calmer cette douleur déchirante par cette douceur qu'il me porte. Il me faudrait de la violence, des cris et des coups pour me calmer. Pour supplanter la tempête qui fait rage en moi.
« ANNA… ANNA… ANNA.. »
Je me relève et fais quelque pas dans une direction quelconque. Je ne sais plus où je vais, je ne veux qu'avancer. Je vacille; mes jambes molles peinent à me supporter alors que je fais quelques autres pas. Je m'appuie sur un plus gros rocher, d'abord avec ma main, puis avec mon dos. Les larmes sortent enfin alors que le désespoir m'envahit. C'est terminé, je ne retrouverai jamais ma sœur. Plus jamais je ne verrai cette personne que j'ai tant aimée tant chérie. Cette sœur dont j'ai tant pris soin ne me sera pas rendue et je ne veux plus vivre une journée de plus sans elle. Je me laisse glisser vers le sol où mes fesses atterrissent rapidement. Je ne suis plus qu'une petite boule de larmes et de désespoir.
« Anna… Anna... »
Le temps s'est arrêté. Il n'existe plus que moi et ma peine. |
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Sujet: Re: Petite nostalgie d'un monde pourri Dim 4 Oct - 14:57 | |
| Eye Of The Tiger
Théodore Lefaucheux | Ce fut avec une extrême douceur qu'elle s'extirpa de mes bras, me repoussant de son champ de vision, embrassant du regard le paysage désertique de la présence qu'elle y cherchait désespérément. Je la regardai, impuissant. Tremblante de tous ses membres, elle finit par s'échouer contre un roc, les larmes s'échappant enfin de ses paupières. De longues inspirations saccadées secouaient son corps provoquant leur chute. L'image d'Ivy se superposa à l'adolescente, avec ses yeux rouges et gonflés, sa bouche déformée de gros sanglots criés, son visage baigné de larmes de crocodiles. Etrange comme la douleur et le désespoir s'enfouissent en nous lorsque nous sommes adultes alors qu'enfant, notre seule envie est que tout le monde sache à quel point on a besoin d'attention. Aussi jeune que puisse me paraître le petit corps perdu que je venais de trouver, ce n'était plus une enfant. Au diable mon panneau donc. Je le posai néanmoins au mieux que je pus contre un rocher pour qu'il indique, ne serait-ce que temporairement, la direction du village. Cela fait, je m'approchai de la jeune femme.
« Hum. Hey. Do you understand me ? » (« Est-ce que tu me comprends ? »)
Aucune lueur ne traversa son regard. Elle ne sembla pas plus voir la main que je passai devant son visage que réagir aux claquements répétés de doigts que je fis près de son oreille. Inquiet, je cherchai son souffle : si lent qu'il me paru un instant inexistant, il était pourtant régulier. Tout cela dépassait complètement mes compétences. Je réajustai ma besace et entrepris de relever la jeune femme. Ses muscles ne la tenaient plus. J'allai devoir la porter.
« I don't know what's happening to you but it's not good. I take you to our doc, he will know what to do. » (« Je ne sais pas ce qui t'arrive mais ce n'est pas bon. Je t'emmène chez notre doc, il saura quoi faire. »)
Toujours aucune réaction. D'un coup de rein, je la chargeai sur mon dos, prenant soin de caler sa tête dans le creux formé par mon cou et mon épaule.
Lorsque j'arrivai enfin au centre de Gavin, j'eus l'impression d'avoir porté le monde pendant des siècles. Mes muscles étaient ankylosés, coincés dans toute les précautions que j'avais mise à la protéger des cahots de ma démarche sur le sol inégal. Gavin s'affaira aussitôt, m'écartant de l'autre côté de la table.
« I will find her, » murmurai-je à son oreille. (« Je vais la trouver. »)
Que dit-on déjà ? Ne fais pas de promesses que tu ne peux pas tenir ? .
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