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I'm not scared to jump, I'm not scared to fall

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MessageSujet: I'm not scared to jump, I'm not scared to fall I'm not scared to jump, I'm not scared to fall EmptyMar 14 Jan - 1:17

je suis une actrice qui connaît le jeu qui ne lui fut jamais écrit
Féminin

Lena M. Oliver

Lena M. Oliver
I'm not scared to jump, I'm not scared to fall

Because falling's not the problem, when I'm falling I'm at peace ; if there was nowhere to land I wouldn't be scared at all.


Je suis la fille de ce roi qui l'aura envoyée dans un Nouveau Monde mystérieux. De ce roi qui l'aura prise à charge seulement pour la jetée avec une faible dot vers un avenir incertain. Je suis cette fille inconnue qui n'aura jamais pu comprendre le monde duquel elle venait ; une étrangère qui apprend un univers différent et qui le dessine du bout des doigts : là, au pied de cette montagne, il y aura une maison, ici un amant, puis là un enfant. Ici un civilisation, là un univers.

Je suis l'artiste forcée d'une nouvelle Amérique qu'elle s'oblige à faire exister. Une femme, tout simplement, qui se doit d'être une femme dans une société où il n'existe pas encore de rôles : je suis une actrice qui connaît le jeu qui ne lui fut jamais écrit, qui l'interprète avec en mémoire les directives d'un metteur en scène depuis disparu.

Je suis une iconoclaste qui ne saurait être autre chose, faute de n'avoir jamais eu ni racine, ni amarre, car je fus élevée isolée du monde avec pour seule compagnie un être de silence et de secret ; ce roi se prêchant lui-même sa divine raison.

Je suis le fantôme d’un souvenir, l’unique relique d’une camaraderie éteinte. Je suis la rescapée du secret qui n’a pu être partagé. Je suis la naissance d’un rêve, l’élément déclencheur qui causa la sublimation de mon roi en dieu : je suis la mort de son humanité personnelle, mais la genèse d’une humanité nouvelle qui toujours lui appartient.

Je ne sais pas ce que je désire faire du reste de ma vie, car j'ai jusqu'à présent vécu comme si déjà j'étais morte, ou comme si ma vie ne m’appartenait pas : je suis le pantin d'un marionnettiste absent qui continu de danser, parce j'ai peur que si je cesse de m'animer au faible souffle mon dieu, il ne restera de moi plus qu'une carcasse vide, déchirée de tout sens.

Je suis une pionnière active qui sait ce qu'elle doit faire, mais qui ne sait plus pourquoi le faire et qui tente de combler son vide en s'activant davantage, espérant ainsi nourrir le mécanisme pour que celui-ci ne cesse soudainement de tourner.

Mon dieu sacrifie sa vie afin d’en posséder plusieurs ; il est vivant, mais il ne sert en fait qu’à alimenter les autres ; il est le pied d’un arbre immuable, quant à moi, j’en suis la plus basse et solide branche, figée et incapable de danser avec le vent. Au bout de cette branche, il y a une pomme qui n’attend que de tomber. Elle pourrait rouler loin, loin, ou peut-être pas si loin que ça, et la connexion avec l’arbre mourait, la pomme aussi, en quelque sorte, mourait et se décomposerait et féconderait la terre de son cadavre : il naitrait de celui-ci un nouvel arbre, un arbre intime, plus petit qui serait peut-être suffisamment souple pour ressentir et vivre dans le vent.

Je crois que j’aspire à devenir cet arbre : un arbre indépendant avec une vie qui lui est propre, un arbre qui prendrait enfin ses propres racines, qui pourrait peut-être toucher d’une quelconque façon celles de son aïeule, mais qui troucherait aussi le ciel et qui enfanterait d’autres pommes, d’autres arbres et qui supporterait ainsi le rôle préprogrammé que lui aura légué l’arbre-père.


Je suis livrée à moi-même devant un véritable arbre, un énorme arbre ; c’était un géant muni de plusieurs pieds et d’une centaine de bras et ses nombreuses épaules, noueuses, étaient solidement pétrifiées dans une collection d’émotion : appendices tendus, parfois tirés comme s'ils étaient suspendus et simplement déposés sur le lit de feuilles, d’autres fois prostrées comme s’il y reposait tout le poid du ciel, tout le poid du monde. J'avais l'impression qu'il me ressentait, que des centaines de feuilles et de fruits me comprenaient.

Un pied sur une racine protubérante, le genou replié, mes doigts tripotaient songeusement ses rides d’écorces, j’avais la terrible impression de perdre mon temps depuis que le brouhaha de réflexions avait envahi mon esprit, mais un énorme ressentiment me saisissait au ventre quand je songeais reprendre ma chasse. J’ai besoin de quelque chose, de quelqu'un. J’ai besoin de tomber de l’arbre, j’ai besoin d’en devenir un moi-même, j'ai besoin de porter mes propres fruits et de dessiner ma propre forêt.
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