Tu ouvres les yeux, tirée du sommeil par le changement de lumière. Le soleil n'est pas encore levé mais il éclaire déjà la surface des grandes eaux. Tu t'étires sur ta branche, te gratte le dos contre l'écorce rugueuse de l'arbre qui t'a abrité. Ce n'est jamais le même tous les soirs mais ils sont toujours très proches du campement. Qui commence à s'agiter à tes pieds. Les bipèdes s'activent. Ils sortent des tentes et s'étirent eux aussi, se disent quelques mots. Tu les observes faire leurs gestes routiniers. Le plus souvent, c'est la plus petite qui ravive les braises de la nuit. Elle met ensuite quelque chose d'odorant à chauffer au-dessus, qu'ils mangeront tous ensemble avant de s'éparpiller.

Pendant longtemps, il peut alors n'y avoir personne au campement. C'est dans ces moments-là que tu descends au sol et que tu fourres ton nez partout. Tu en as fouillé presque chaque recoin maintenant. Ta cahute préférée sent la fourrure, elle a quelque chose de réconfortant. Mais c'est dans une autre que tu as trouvé les plus beaux trésors : d'étranges objets brillants, de toutes tailles et formes. Certains te rappellent ton cadeau, bien rangé dans la petite gourde de bois.
Il y a quelques nuits, deux femmes les ont sortis de leur boîte et les ont porté, certains autour du cou, d'autres aux bras, aux mains, aux jambes. Juste éclairées par le feu et la lune, elles ont évolué sur la plage en circonvolutions complexes sous les yeux attentifs de leurs compagnons. Tu te glisses entre les tentures et retrouve la boîte dans laquelle ils sont rangés. Comme elles, tu passes chacun d'eau à tes bras, à tes doigts. Ils sont froids mais doux. Au premier mouvement que tu fais, ils tintent doucement. Ce son semble les animer tous. Tu ris. Tu agites tes doigts près de tes oreilles et tu ris encore.

Mais des voix s'élèvent, proche. Lisière du bois. Tu arraches chaque morceau de métal et fourre le tout dans la boîte que tu repousses maladroitement du pied. Tes sens s'aiguisent. Ils ne sont pas nombreux. Le bruit de leur pas dans le sable les amènent jusqu'à l'âtre. Ils ne semblent pas t'avoir entendu. Avec précaution, tu écartes légèrement les toiles et tu les cherches du regard.
.