Les ombres deviennent sonores

Les murs de la caverne ne sont guère plus que des taches sombres dans la noirceur. Un mélange vaporeux de reflets et d’images mentales, du noir et du gris foncé qui s’animent, qui dessinent des reflets et des vagues. Quelques mètres plus loin, ce n’est que du noir, et pourtant qui s’anime lui aussi dans des formes imperceptibles, et seulement dans les coins les plus sombres.

Des bruits fusent épars de la noirceur : des bruits silencieux, des grattements, des frottements. On se concentre sur le silence : le silence entre des pas rocailleux, le silence entre des soupirs, entre des plaintes. Le silence était rassurant. La vapeur d’ombre tourbillonne, bouge, rampe. Les ombres sont inquiétantes, les ombres, comme les bruits, sont partout. Il faut avancer dans le noir en ignorant l’invisible, mais celui-ci est difficile à ignorer : il se manifeste, il se matérialise. Les sons deviennent palpables en provoquant des tremblements, des frissons, tandis que les ombres, elles, se solidifient et deviennent sonores.

Arrivés dans la cavernes, nos personnages en sont à la dernière partie de l’aventure. Ces quelques actions sont mises à votre disposition afin de faire avancer les choses :

- Avancer à l'aveuglette le temps d'un post.
- Tenter de trouver une source de lumière fiable.
- Perdre les moyens le temps d’un post.
- S’appuyer contre la paroi de la caverne.
- Observer deux points lumineux au loin.

Bonne chance.

La poudre blanche la conserve depuis des jours, ta proie. Tes marques éloignent les prédateurs qui traînent. Sauf les bipèdes.
Ils avancent sans ralentir, droit sur elle. Ils entrent sur ton territoire. Tu en reconnais deux. Leur odeur est différente, camouflée sous celles de mangeurs d'herbes.
Parfois, vous traquez ensemble. Le premier qui tue gagne le droit de manger. La forêt donne à ceux qui l'habitent, celui qui ne tue pas trouve gibier ailleurs.

Mais il y en a d'autres. Tu montres les crocs en silence. Ils sont trop nombreux. Tu ne peux pas réclamer ta proie.
Tu dois reprendre la chasse.

Tu recules dans la pénombre des branches. Mais leurs silhouettes s'enfoncent dans la grotte et disparaissent. Ta gueule se détend. Tu renifles. Toutes ces odeurs autour de ta proie... Tes griffes se resserrent sur le bois.

Tu dois la déplacer. Maintenant.

La cadence accélérait, poussée par des vents austères.

- Gavin est beaucoup trop… délicat. Répondis-je en fronçant du nez, mal à l’aise à l’idée de câliner un garçon plus joli et féminin que je l’étais moi-même. C’est peut-être ce qui attirait Ashton… Et pourtant, Lena qu’il semblait désirer également était beaucoup plus virile que Gavin et lui combinés.

Des striures noires virent se mêler aux bourrasques blanches. Le noir n’était pas naturel, inquiétant, mais le blanc demeurait le seul problème duquel s’inquiéter. Il fallait avancer, où nous deviendrions nous aussi des morceaux de l’hiver, des corps d’abord blanchis par le froid, puis qui s’écouleront dans la terre au printemps, la chair noircit révèlerait des ossements pales, blafards, qui évanouiraient finalement en poussière.

Théodore avançait en tête du groupe, loin de moi, et pourtant je savais qu’il s’inquiétait. Je m’inquiétais certainement pour lui, sans doute plus que pour moi-même, surtout plus que pour l’enfant que je portais. C’était, surprenamment, Ashton qui veilla sur moi et qui me guida jusqu’à la caverne. Le cadavre sur notre chemin importa trop aux gens à mon gout… Après tout, nous n’étions pas certains de ne pas le rejoindre et leurs vies devraient leur importer plus que sa mort.

La caverne était froide, mais d’un froid différant de l’extérieur. Elle était humide et immergée dans le noir. J’étais debout, les mains contre mon énorme ventre, un peu accroupie et surprise d’être arrivée là, voire plutôt surprise de prendre conscience que j’étais rendue là. Je croisai le regard soucieux de notre chef, mais détournai le regard en me disant qu’elle ne pouvait me regarder comme ça que parce que j’étais enceinte, puis cherchai à mon tour Théodore du regard. Il devait être bien déçu… Au sein de cette expédition, chasser était désormais hors de question pour lui, ou pour tous les chasseurs en fait. Après un court examen visuel des lieux, je constatai avec déception qu’il n’y aurait peut-être pas de champignons pour moi non plus.

Essayant vainement de pourchasser la chaleur, le groupe s’enfonça dans les abimes de la grotte, vers la noirceur la plus complète. Malgré les respirations et les pas, les positions exactes des autres devenaient floues. Désorientée, je du avancer à l’aveuglette, au final, comme je n’avais jamais cessé de le faire depuis mon arrivée dans ce Nouveau Monde.

Action -Avancer à l'aveuglette le temps d'un post.

Vous avez avancé à l'aveuglette dans le noir:

Des rumeurs naissent de l’abime et font frissonner le groupe. Des grattements échos rebondissent épars contre les murs de pierres, des gouttelettes tombent à un rythme dispersé. Dans votre marche aveugle, vous frôlez un mur qui vous force à ajuster votre marche. Plus loin, des formations irrégulières vous font louvoyer dans un dédale ténébreux. Vous ne savez plus où vous êtes, vous n’entendez plus les autres non plus. La panique vous gagne. L’obscurité est complète ; vous auriez voulu ouvrir les yeux plus grands, mais peu importe combien vous forcez des yeux, ceux-ci n’arrivent à distingués que des hallucinations vaporeuses dans le noir. Votre respiration devient plus forte, votre cœur bat dans vos oreilles. Enfin, vous trouvez un mur humide et y glissez vos mains. Au loin, le son d’un grognement vous affole, mais avant que vous puissiez vous en inquiétez, vos pas vous mènent vers le boucan rassurant de vos amis qui survivent eux aussi dans la noirceur.

Après quelques minutes d’égarement, vous avez enfin retrouvé le groupe.

Tu attends qu'ils disparaissent tous avant de quitter ton perchoir. Tu renifles le corps froid. Il est grand et lourd. Inerte. Tu grognes, tu grimaces. Mais tu dois le déplacer. Tu le tires sous un grand arbre et tu grimpes aux premières branches. Tu attends plusieurs souffles, les prunelles fixées sur la grotte. Rien ne bouge. Alors, tu les secoues, tu les vides de toute leur poudre jusqu'à faire disparaître ta proie.

Et maintenant ?
Tu fouilles la noirceur de tes petits yeux. Tu la connais cette grotte, tu la partages avec ceux qui vivent autour. Que veulent les bipèdes ? Tu n'en vois jamais autant d'un coup. Que cherchent-ils ?
Tu marches dans leurs traces de neige tassée. De loin d'abord. Tu veux éviter les pointes volantes des traqueurs. Un abri ? Non. Ils s'enfoncent dans la terre. Tu t'ébroues. Ce que font les bipèdes ne regardent qu'eux.
Mais tu es curieuse.

Tu les suis.

|-|

Tu es prudente. Tu crois qu'ils vont te voir, t'entendre. Mais ils ne sont plus si forts, les bipèdes : leurs sens les trompent. Leurs yeux ne servent à rien, ils sont aveugles dans le noir ; ils se retournent au moindre bruit, de l'eau, un caillou ; ils s'aident de leurs mains pour trouver leur chemin.

Tu t'enhardis. Tu te coules le long de la roche, tu te rapproches. Ton souffle se mélange parfois aux leurs.

Des rêves colorés et artistiques, ses pensées s’assombrirent de même que la tempête. Elle voyait dans la neige sale de sombres promesses, puis dans la caverne sombre, le serment d’un tombeau. La certitude qu’elle allait mourir l’eu prise avec force dès que l’air humide pénétra ses poumons. Elle, personnellement, allait mourir à cet endroit précis. Peut-être que le reste du groupe s’en sortirait, mais pas elle. Elle allait mourir sans jamais revoir la lumière du jour. En fait, elle allait mourir sans jamais revoir quoi que ce soit, prisonnière des ténèbres, de la noirceur la plus totale.

Dans sa gorge, l’air devenait brulant, dans ses oreilles, les sons informes. Elle entendait des craquements, des frôlements, et surtout, elle entendait le vide dans lequel elle s’éteindrait. Un vide aussi total que les ténèbres qui l’enveloppait.

Quelqu’un la frôla et grommela quelques excuses inaudibles. Elle prit momentanément appui sur cette personne.

- Je crois que je meurs. Dit-elle tout bas, avant de lâcher le membre tremblant, seulement pour tomber au sol après s’être sentie défaillir. Le contacte du sol lui fit du bien, la ramena sur terre plus qu’en simple image. Elle respirait fort, elle se susurrait qu’elle allait bien, que tout allait bien aller, que la tempête allait se calmer et qu’ils pourraient retourner au village.

À nouveau, quelque chose la frôla, quelque chose qui se tenait au ras du sol et qui était revêtu d’un duvet qui lui semblait trop rêche pour être le manteau de l’un de ses compagnons d’exploration. À nouveau, la terreur l’inonde, et tout d’un coup ses murmures sont plus aigus, presque larmoyants. Je vais mourir. Non. Non. Oh non. Je ne veux pas mourir. Elle pensa également que même si ils sortaient d’ici vivant, qu’ils allaient tous mourir de faim au village de toute façon. Peut-être que mourir ici serait mieux, au final...

Non. Elle ne voulait pas mourir seule dans le noir.

Elle perdait tous ses moyens.

En fait, on meurt toujours seul.

Quelque a perdu les moyens:

L’angoisse silencieuse se viole un chemin partout, mais semble particulièrement affecter Teva Riddell qui après une grande vague de panique, s’y noie et s’évanouit. Son corps tombe de tout son long sur le sol meuble de la caverne.


Pour l’instant, la torpeur lui est plus confortable que la réalité. Elle n’est pas blessée et devrait reprendre ses moyens avec un peu d’aide.

Vous vous êtes appuyé contre le mur de la caverne :

Après être devenue sonore, la noirceur devient solide. De l’invisibilité se mut la texture vagabonde d’une peau sèche, d’une fourrure rêche qui se glisse contre votre bras. Le souffle nauséabond de la bête s’immisce dans votre nez, dans votre bouche, puis la présence se dissipe vite dans le vide en laissant seulement dans vos oreilles l’écho d’un grognement.


… Mais qu’est-ce que c’était que cette chose ?

Soudain, tu sens quelque chose. Tu renifles profondément. Une odeur suave se mélange à la sueur et la peur des bipèdes. Elle vient de loin, enfoncée dans la grotte. En réalité, tu la respires depuis un moment mais la curiosité t'empêche d'y faire attention. Maintenant, tous tes sens sont en alerte. Ce n'est pas bon de rôder ici en sa présence. A contre-cœur, tu commences à te retirer contre un mur pour éviter leurs mains chercheuses de sens. Tu frôles au sol un corps qui ne bouge plus. Instinctivement, tu cherches des yeux le bipède le plus proche et d'une patte timide, tu tirailles la peau qui entoure sa peau.
Pourquoi as-tu fait ça ?

Tu échappes à sa main avec facilité et tu poursuis ta route à regret vers la forêt blanche.

Comment ne peuvent-ils pas la sentir ?

Son odeur volette tout autour de toi maintenant, odeur de musc un peu rance qui s’imprègne dans ta fourrure. Tu éternues plusieurs fois pour t'en débarrasser mais cela reste. Elle se rapproche.

Ne l'entendent-ils pas ?

Elle grogne, elle jubile d'avance de toutes ces proies qui viennent se jeter dans ses griffes sans même qu'elle sorte dans la froidure. Tant de temps qu'elle économise. Elle va jouer.

Tu presses le pas.